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mardi 24 septembre 2019

Réforme Delevoye : le danger de la compensation par l'ASV



Vous le savez sûrement, la réforme des retraites que prépare M. Delevoye nous promet l'enfer, avec ses 28 % de cotisation pour les revenus inférieurs à 40000 €. La plupart d'entre nous verront leur cotisation retraite doubler. Pour certains, ce sera pire encore. Vous pouvez calculer la force de votre propre tsunami avec ce mini-site mis en place par Logicmax (ils n'y gagnent rien), avec le concours de deux infirmiers blogueurs :

https://reforme-retraite-liberaux.fr/

Dans la revue l'Orthophoniste de septembre 2019, en page 9, la FNO réitère sa revendication de compensation de cette augmentation sidérante par trois mesures :
  • "Une augmentation de la prise en charge forfaitaire des cotisations retraite, de l'avantage social vieillesse (ASV) par l'Assurance maladie.
  • Un changement partiel d'affectation de la CSG [...].
  • Le maintien de l'assiette actuelle : bénéfice + assurances Madelin. [NDLR:  Pour l'instant, M. Delevoye veut y ajouter les charges sociales. Donc il prévoit de nous faire payer de la retraite sur l'URSSAF et sur la retraite elle-même, comme c'est déjà le cas de la CSG...]
Attardons-nous juste sur le premier point : le second est vague et ne jouerait que sur quelques pourcents. Quant au troisième, ce n'est même pas une compensation, mais juste l'évitement d'une aggravation supplémentaire !

Vu de loin, la compensation par l'ASV paraît cocher plusieurs cases sur la checklist de la bonne idée.


Mais déjà, qu'est-ce que c'est, l'ASV ?

C'est notre troisième régime de retraite, après le régime de base et le régime complémentaire. On l'appelle aussi "régime des praticiens conventionnés". Il ne concerne que de petites sommes, mais enfin le principe est symbolique : l'Assurance maladie paie une partie de la cotisation pour nous.

On pourrait donc imaginer que l'Assurance maladie se mette à cotiser massivement pour nous, pour compenser la réforme Delevoye. Ce serait un peu le même principe que celui des cotisations patronales pour les salariés.
A la base, c'est tentant. Le problème serait réglé. Cela fait des mois que la FNO et les autres syndicats de paramédicaux revendiquent dans ce sens. Ils négocient avec M. Delevoye (ils l'ont vu ce mois-ci), au lieu de refuser les 28 % qu'ils pensent inéluctables. C'est évidemment une stratégie mûrement réfléchie, et logique a priori.



Donc tout va bien, dormez braves gens ?

Le problème, c'est que l'ASV est une planche vermoulue. En 2008, il allait vers la faillite. Il a donc subi une réforme dramatique tombée d'en haut et imposée sans coup férir. J'en ai parlé ici à l'époque  mais je vous la résume aujourd'hui pour faire court.

Avant le sabordage de 2008, nous payions juste 78 € par an à ce régime. Cela donnait droit à 44 points qui valaient 2,60 € chacun.

La réforme de 2008 nous a fait monter à 180 € (devenus 195 cette année) et a ajouté une cotisation de 0,16% du revenu. 

Ainsi, cette année, une orthophoniste qui gagne 30000 € paie 243 € au lieu de 78.

Dans le même temps, le nombre de points attribués par la cotisation forfaitaire est passé de 44 à 24,5. Et comble du bonheur, la valeur du point est elle-même passée de 2,60 à 1,20 € (1,32 aujourd'hui).

En résumé, si on prend un paramédical qui gagne 30 000 € par an :
  • Il payait 78 € en 2008, il paie maintenant 243 €.
  • Il accumulait 114 € de droits de pension bruts annuels, il en accumule maintenant 38,94.
Cotisation multipliée par trois, droits de pension divisés par trois et revenus risibles.  

Au total, le rendement a été divisé par neuf !


Comme ça, sans rigoler. Les syndicats n'ont rien pu faire. La CARPIMKO non plus. Tout ce qu'on a obtenu, c'était la participation de la sécu à hauteur de 60 % de la nouvelle cotisation proportionnelle. Même pas 2/3 comme avant.

Et on veut faire confiance à l'ASV pour compenser la réforme Delevoye ? Qu'est-ce qui empêchera le gouvernement de 2035 de décider que la fête est finie et que l'ASV mérite un nouveau coup de massue ?

"Merci, bienvenue dans le monde merveilleux des 28 %, bon courage. Parce qu'après tout, vous avez bien profité, quand même !"

On commence d’ailleurs à entendre cet argument en 2019.

En 2008, nous avons absorbé cet effondrement parce que ce régime avait toujours été négligeable pour nous. C'est plus un symbole qu'autre chose, pour nous rappeler la chance que nous avons d'être conventionnés (la chance, c'est surtout d'avoir des patients solvables et de payer moins d'URSSAF qu'un artisan).

Mais miser maintenant notre avenir là-dessus, c'est vraiment nous asseoir sur un château de cartes. Vraiment, je peine à comprendre, même si je ne demande pas mieux que de faire confiance à nos dévoués collègues du seul-syndicat-représentatif-dont-l'information-est-vérifiée-pas-comme-sur-Facebook.



J'espère que l'avenir donnera raison à la FNO. Madame Dehêtre écrit dans son dernier édito qu'elle "refuse que les orthophonistes servent à gonfler les rangs d'une manifestation pour d'autres intérêts que les leurs". In fine, si l'ASV est vraiment une planche de salut, nous aurons peut-être eu raison d'abandonner les autres professions libérales sur le champ de bataille. Nous n'avons apparemment pas d'amis, nous n'avons que des intérêts. En même temps, pour une organisation qui ne perd jamais une occasion de se gargariser avec la solidarité, c'est un peu étrange...

4 commentaires:

Laurence a dit…

Je ne lis jamais l’édito, erreur ! Comment Anne Dehêtre peut elle aussi affirmative ? Sans doute n’a t’elle pas participé à cette fabuleuse manif d’orthos à Paris il y a quelques années : nous étions une poignée de gentils orthophonistes cantonnés sur une petite place, il faisait un froid de gueux, les CRS s’ennuyaient ferme et nous aussi, et le résultat fût....

m-lis a dit…

Merci c'est très bien expliqué, moi qui ai eu mon bac en 2008, je n'avais pas notion de cela... Delevoye, les députés, l'Etat et la FNO sont à pleurer.

Misia a dit…

Je n'arrive pas à comprendre comment la FNO peut approuver les 28%... Je croyais que ceux qui en font partie étaient des orthos en exercice ? Dans ce cas, ne sont-ils pas conscients que c'est juste impossible de payer des cotisations aussi énormes ? Que nombre de libéraux vont mettre la clé sous la porte ? Ça me sidère...

Anonyme a dit…

Que peut- on faire? Quelqu'un a- t- il une idée? Donnez- moi un peu d'espoir...