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lundi 4 mai 2009

Attaque originale contre la citadelle médicale




Le gouvernement semble avoir trouvé un angle d'attaque subtil contre les syndicats médicaux. Cela ne concerne pas directement les paramédicaux, mais cela donne une idée des relations entre le Pouvoir et nos professions.

Petit retour en 2001. Depuis 1998, les médecins et la sécurité sociale n'étaient pas arrivés à signer un accord tarifaire. La Loi prévoit dans ce cas que c'est le gouvernement seul qui décrète les montants. Ce fut donc le cas. En réaction, 7 syndicats mécontents (CSMF, SML, FMF, UMESPE, SYNGOF, SNPP, SNPF) trouvèrent une astuce pour que les médecins de secteur 1 pussent contourner le système : ils leur conseillèrent d'utiliser au maximum le dépassement d'honoraires pour "exigence particulière du malade". Comme vous le savez, nous avons aussi le droit d'utiliser ce dépassement avec tact, parcimonie et surtout mansuétude envers les déficits des comptes sociaux.

Mais l'association Familles Rurales ne l'entendait pas de cette oreille. Elle décida donc de saisir le Conseil de la concurrence. Cette instance estima que les médecins avaient ainsi gagné 180 millions d'euros indus entre 2001 et 2005 ! Dès que les syndicats ont diffusé leur astuce, en 2001, le nombre de dépassements d'honoraires pour demande exceptionnelle du patient a doublé. Il y a en effet 4 ans que les médecins ont enfin signé une nouvelle convention avec la CNAM, ce qui a mis fin aux dépassements litigieux.

Le Conseil de la concurrence a considéré que les syndicats avaient le droit d'informer leurs adhérents, mais qu'ils n'étaient nullement investis "du pouvoir de fixer librement les prix, mais seulement de les négocier avec les caisses." Il a enfin constaté que ces dépassements avaient "transformé en exceptionnelles les plus normales des demandes" des patients. Voici quelques exemples de demandes exceptionnelles motivant des dépassements d'honoraires, citées par le Figaro l'an dernier :

  • accorder un rendez-vous en moins d'un mois
  • accorder un rendez-vous après 17 heures
  • établir plusieurs certificats médicaux
  • accepter la carte Vitale
Le Conseil de la concurrence a finalement jugé que les 7 syndicats de médecins avaient organisé une entente entre leurs adhérents afin de provoquer une hausse du prix des consultations. Il n'y est pas allé de main morte : en avril 2008, il a infligé des amendes aux 7 syndicats accusés, oscillant entre 11 et 27% de leurs ressources annuelles.

Le 20 mars dernier, la Cour d'appel de Paris a annulé ce jugement, considérant que les ententes entre médecins conventionnés n'étaient pas anticoncurrentielles et ne relevaient pas du Conseil de la concurrence. Mais le ministère de l'économie vient de se pourvoir en cassation. Les syndicats de médecins fulminent à nouveau : ils pensent que cette procédure est utilisée par le Pouvoir pour "briser le syndicalisme médical" et les museler au moment où ils se battent contre la loi Bachelot.

Nous concernant, j'en tire plusieurs conclusions :

  • Le gouvernement est prêt à tout utiliser contre nos professions. Puisqu'il n'hésite pas à poursuivre les médecins, qui disposent pourtant de relais dans les médias, il lui sera encore plus aisé d'agir contre les paramédicaux. Son attaque actuelle me paraît finement jouée : elle fait passer les médecins pour des gens cupides, auprès du public. Quand on rencontre des résistances chez un adversaire, il est toujours judicieux de le déconsidérer pour le couper du soutien des masses. Machiavel n'est pas mort.
  • Un syndicat responsable, reconnu et REPRESENTATIF (tic de langage de la FNO, hors de cause sur ce coup) peut inciter ses adhérents à détourner l'usage des articles de leur convention, à des fins pécuniaires. Je ne pensais pas que ce fût possible.
  • Les syndicats de médecins se montrent toujours en pointe sur la question tarifaire, quitte à mettre un pied sur la ligne jaune. Le montant de la consultation revient sans cesse dans leurs revendications. Les orthophonistes, eux, aiment se focaliser sur les gratifications des stagiaires et la formation initiale de 5 ans. Qui défend le mieux ses adhérents ? Question de point de vue...
  • Même si la Cour de cassation leur donne raison in fine, il est probable que les médecins et les paramédicaux réfléchiront deux fois avant de récidiver sur ce genre de consigne douteuse. Donc l'Etat et les caisses auront tout de même remporté une victoire relative.
Vous trouverez ici le communiqué énervé de la CSMF, qui va jusqu'à utiliser le vocabulaire d'Alain Juppé ("droit dans ses bottes") contre un gouvernement UMP ! Nous vivons des temps héroïques.

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